dimanche, octobre 15, 2006

"Mémoires immigrés" de Yamina Benguigui



Structuré en trois parties de 52 mn (les pères, les mères, les enfants), il est une pure merveille : enfin une parole d’immigrés sur les écrans de la télévision, enfin une parole sensible permettant de saisir autant l’historique que l’humain. Le propos est centré sur la question du retour, ambiguïté partagée par les immigrés comme par les autorités françaises, et par la révolution qu’a apporté l’instauration du regroupement familial : les enfants étant davantage d’ici que de là-bas, les immigrés se fixent finalement dans le pays d’accueil.

Ce film a le grand mérite d’aller voir à notre porte ce que l’on ignore et agit ainsi comme un extraordinaire révélateur. Révélateur humain mais aussi révélateur des ambiguïtés historiques qui fondent les malentendus actuels. Sur un sujet où domine la confusion et les approximations, où remontent les préjugés issus de la figure de l’indigène colonial qui n’a cessé de se perpétuer dans les mentalités, où foisonnent les manipulations politiques, il éclaire avec force un débat essentiel et jette un pavé salutaire dans la mare des cristallisations xénophobes et identitaires. Il est urgent de comprendre et d’interroger nos représentations des populations immigrées : ce film émouvant et passionnant de bout en bout y contribue mieux que n’importe quel discours

Intervention de Mr MAANI (Hamid MAANI est sociologue. Il prépare une thèse sur l’origine sociale des couples franco maghrébins avec Augustin BARBARA professeur de sociologie à l’université de Nantes et spécialiste des mariages mixtes. Hamid MAANI enseigne à l’école des jeunes éducateurs de Rezé et milite dans des associations comme l’ASAMLAC - association santé migrants Loire Atlantique -) .


Les enfants d'immigrés sont-ils intéressés par un repli identitaire ?

Constat : selon les travailleurs sociaux et les enseignants, les jeunes maghrébins essaient de constituer un groupe à part (cf. aussi études récentes sur les quartiers sensibles comme l'ouvrage de D. Le Poutre, "Au cœur des banlieues").
A Nantes, ce phénomène de repli existe-t-il ?

a) Le référent ethnique
Dans certaines banlieues de Nantes, on observe la constitution d'un groupe "maghrébin" à partir de deux référents dans le discours : un référent maghrébin et un référent religieux.
Les jeunes se définissent en tant que groupe : "nous" contre "eux" (les non arabes).

Fréquentation des associations en fonction du pays d'origine (club de foot, activités des maisons de quartier…)

Les jeunes se désignent par rapport au groupe de leurs parents (je suis marocain) et cherchent concernant le langage à avoir l'accent arabe (rouler les r, expressions et insultes en arabe).

Défense de causes arabes : exemple : question palestinienne

Reprise de stéréotypes : code de l'honneur

Port de certains objets : main de Fatima et henné pour les filles, le keffieh palestinien pour les garçons, les écussons du pays, la manière de se saluer…

Cependant, les jeunes ne mettent pas en avant la référence à une communauté mais font référence à la nationalité des parents et aux conflits territoriaux (problème sahraoui).

b) Le référent religieux joue t-il un rôle important ?
Une minorité de jeunes est mobilisée autour de la religion car les parents ont peu transmis les valeurs religieuses. En effet, ceux-ci sont issus du monde rural, et ont donc été peu scolarisés et ont donc peu ou pas étudié les textes religieux. Et les parents sont la seule source d'informations.
En fait, le véritable problème est la récupération de ses jeunes par des pseudo religieux.

La question à se poser est le pourquoi de cette référence à la religion.
C'est d'ailleurs un phénomène nouveau, depuis 1990, qui provient de plusieurs facteurs :

l'essoufflement de la politique de la ville qui a été mise en place dans les années 80, où les problèmes spécifiques des enfants d'immigrés sont apparus (émeutes dans les banlieues de Lyon…).

Difficulté d'accès à l'emploi (s'ils n'ont pas d'emploi, c'est parce qu'ils sont maghrébins)

Déconsidération par les Français de l'islam ; et donc tous ceux qui partagent les valeurs de l'islam se positionnent en tant que contestataires.

L'histoire des parents : les parents ont été exploités et on veut les mettre à la porte. Les enfants refusent la logique de l'invité adoptée par les parents (je ne suis là pas chez moi, donc je ne cherche pas le conflit). Les enfants pensent en terme de droit. Ils déconsidèrent l'autorité parentale car leurs parents ont accepté des conditions inacceptables (refus des métiers manuels).

Questions des collègues :

Et les filles ? Certaines commencent ce repli identitaire qui jusqu'à présent était réservé aux garçons.

Pourquoi la référence à la culture noire américaine ?

Parce qu'elle valorise la réussite individuelle. C'est une rupture par rapport aux années précédentes qui mettaient l'accent sur l'action collective

liens
http://www.dailymotion.com/video/xhswc_memoires-immigres-1

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